Il est le politicien drogué, alcoolique et séducteur de "La Guerre selon Charlie Wilson". Hors écran, Tom Hanks, le polyforme, est un acteur clean, sobre,… et, lui aussi, incroyablement charmeur.
Il est l’un des acteurs les plus influents et productifs de Hollywood. L’un des mieux payés aussi. Depuis vingt ans, Tom Hanks n’a que rarement chuté au box-office.
Populaire, doublement oscarisé, l’acteur est également un financier avisé et, surtout, un producteur audacieux.
Pour l’heure, Tom Hanks, blagueur impénitent au bagout irrésistible, défend son bébé le plus risqué : "La Guerre selon Charlie Wilson". Un film à l’humour cynique, peu tendre pour les institutions américaines, mais dont le personnage principal, politicard hors norme, ressort finalement grandi et sympathique. Un film qui, sous des dehors de comédie caustique, en dit long sur les racines profondes du 11 septembre, de la double guerre en Irak et de la montée fulgurante de l’intégrisme dans le monde musulman.
Charlie Wilson a tout fait pour qu’en coulisses, et sans perdre un soldat américain, l’Amérique triomphe de la Russie en Afghanistan. Vingt ans plus tard, plus qu’à un affrontement même indirect entre pays, on semble vivre à présent une vraie guerre de religions.
Oui, et c’est fou comme combattre au nom de la religion est devenu de plus en plus suspect depuis le 11 septembre ! Il faut dénoncer cette tendance qui consiste à dire que Dieu est forcément du côté des vainqueurs. Depuis des siècles, ce genre de raisonnement conduit à plus de tragédies humaines que d’actes de justice.
Le vrai Charlie Wilson était pour le moins excentrique. Est-ce facile de se couler dans la peau d’un tel personnage ? Facile, non, bien sûr. De par sa stature d’abord : il est très grand. Donc impressionnant. Et puis, il est d’un naturel désarmant : il se fichait complètement de la manière dont on le dépeindrait. Plusieurs fois, il nous a dit : Quoi que vous imaginiez, quoique vous inventiez, vous serez sans doute proche de la vérité. C’est une réalité : le bonhomme buvait, se droguait, s’envoyait en l’air avec plein de filles. Et pourtant, il était à la tête d’un département hyper-important. Il était à ce point motivé par la cause des rebelles afghans- et, sans doute, l’envie de faire voir aux Russes – que, entre ’80 et ’88, il s’est rendu 42 fois – vous imaginez, 42 fois ! – en Afghanistan.
Vous-même, avez-vous un souvenir de cette période ?
Je me souviens parfaitement avoir vu Jimmy Carter annoncer à la télé que les Russes étaient entrés dans le pays. Je me souviens avoir pensé que la troisième guerre mondiale avait débuté. Que l’Iran allait forcément attaquer Israël. Que la Turquie allait forcément s’en mêler. C’était la politique des dominos. A l’époque, tout aussi forcément, les Américains soutenaient les rebelles afghans. C’était le combat de David contre Goliath, et au fond de lui, l’Américain adore ce genre d’affrontement.
Les deux grosses interrogations du moment aux Etats-Unis sont les prochaines élections… Je n’ai qu’un souhait : qu’Elvis Presley sorte de sa tombe et se présente aux primaires !
…et la grève des scénaristes, qui a forcé l’annulation des golden globes et menace toujours d’annulation la Cérémonie des Oscars.
Là, c’est plus sérieux. De plus en plus, les gens trouvent leur plaisir dans des programmes courts, qu’ils soient diffusés en télé et surtout sur le Net, sur Youtube et autres. Côté films, tout est très vite disponible en DVD ou VOD (vidéo à la demande). C’est un nouveau marché, mais alimenté par des produits existants. Il est normal que les grands networks, les grands exploitants rémunèrent, d’une nouvelle façon, ceux qui les font. C’est aussi simple que ça.
Que dites-vous aux studios qui disent, eux, que les stars coûtent déjà assez cher pour devoir encore mettre la main au portefeuille ?
Que je n’oblige aucun studio, revolver sur la tempe, à me payer autant d’argent. Ils donnent, je prends. Mais ils devraient aussi donner aux autres.
Douze ans après « That thing you do! », on attend toujours votre deuxième réalisation.
Et on l’attendra encore quelques années. Non, je suis trop occupé par mes activités d’acteur et de producteur pour me consacrer pleinement à une deuxième mise en scène. Et j’ai aussi envie de m’occuper de mes enfants. Réaliser un film prend un temps fou…
Quel est votre prochain projet ?
Je vais tourner « Angels and Demons », la suite, ou plutôt la prequel, de « Da Vinci Code ». Ok, je vois déjà le regard. La suite d’un des films les plus démolis de tous les temps mais qui est aussi le deuxième plus grosse recette mondiale de tous les temps. C’est déjà une raison, non ?
Si, à votre tour, on vous disait qu’un acteur allait vous incarner, quel serait le premier conseil que vous lui donneriez ?
De refuser le projet. Immédiatement. Et d’aller voir ailleurs s’il n’y a pas sujet plus intéressant !
Propos recueillis par Pascal Stevens pour